Paris, le 18 avril 2019
Après l’émoi et la stupeur qui ont saisi le monde lors du terrible incendie de Notre-Dame, l’heure est maintenant à la réflexion et à la compréhension.
La cathédrale de Paris est un chef d’œuvre, architectural, artistique et cultuel ; une œuvre humaine exceptionnelle, un joyau du patrimoine, inscrit dans l’ensemble du paysage urbain remarquable des berges de la Seine, protégé au titre du Patrimoine mondial par l’UNESCO.
L’émotion qui a suivi le drame du 15 avril en témoigne et démontre l’attachement des hommes à leur patrimoine,cet héritage de l’intelligence humaine.
Il est la mémoire de siècles de créativité, d’inventivité, de savoir-faire entretenus et transmis jusqu’à aujourd’hui. En tant qu’œuvre majeure de l’humanité, et plus que tout autre, cet édifce a été l’objet des plus grandes attentions. Pourtant, nous venons tristement d’en découvrir la fragilité.
L’action salvatrice de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris a été parfaitement guidée. Par leur persévérance à défendre les tours et à prévenir l’effondrement de l’immense échafaudage, ils ont su limiter les destructions et
sauver la structure principale avec une grande partie des œuvres qu’elle abritait. Nous leur devons le plus grand respect et l’expression de notre profonde gratitude.
Certes, Notre-Dame est profondément meurtrie, mais elle est encore debout !
Sa restauration pourra se fonder sur la merveilleuse connaissance accumulée par des années d’études attentives de l’édifice, un savoir constitué par des spécialistes spécifiquement formés : en premier lieu les Architectes en Chef des Monuments Historiques, les Architectes du Patrimoine, avec l’appui les Architectes des Bâtiments de France et des Conservateurs des monuments historiques, mais aussi par les entreprises expertes qui se sont succédé à sa conservation permanente, sous l’égide du Ministère de la Culture.
On peut comprendre et saluer l’engouement de chacun à vouloir déjà réparer Notre-Dame. Mais commençons d’abord par convoquer et écouter les véritables experts. Ils sauront apporter leurs compétences spécifiques à l’analyse fine des désordres et pourront - au terme d’un diagnostic minutieux, indispensable à la conservation de ce qu’il reste du monument - proposer des principes de consolidation et de restauration cohérents. Les débats relatifs au projet, à la manière de faire - reconstruire « à l’identique » ou non - auront le temps d’exister lorsque cette étape sera franchie. Sous le patronage légitime des instances compétentes en la matière, ils promettent d’être stimulants et, à n’en pas douter, passionnants.
Viendra alors le temps de mobiliser tous les corps d’état spécialisés, les compagnons, hommes et femmes de l’art, qui disposent à la fois des savoir-faire ancestraux et contemporains. La France a su se doter des moyens indispensables à la préservation et à la restauration continue de son patrimoine : gageons que cet effort permanent sera poursuivi. Ce grand chantier sera une opportunité rare pour tous les corps d’état spécialisés de mesurer la qualité et l’actualité de leur art et de perpétuer leurs savoirs en les transmettant aux plus jeunes.
L’Association des Architectes du Patrimoine partage l’exigence d’excellence des Architectes en Chef des Monuments Historiques et des entreprises spécialisées, et leur renouvelle toute sa confiance pour relever ce grand défi.
Notre patrimoine est notre culture.
Il est la trace tangible et indélébile d’un héritage humain colossal et fragile à la fois.
Il est d’intérêt public.
Il est à tous.
Les Architectes du Patrimoine